DEVOIR A MA MEMOIRE DE NOVEMBRE...
« Sans mémoire, il ne peut y avoir d'identité, d'autant que je considère que l'identité remonte bien plus loin dans le temps que notre propre naissance.»
Anselm Kiefer. (artiste)
Ma mémoire est bien fidèle à cette enfance lumineuse ainsi qu'à sa suite plus sombre, et c'est sans doute pour cela que je connais mon identité et que j'ai pu continuer à l'enrichir et l'embellir sans reniement.
Pourtant même si ma vie s'est trouvée modifiée par d'autres sans m'en donner le choix, la colère, la peur, la mort, les larmes, face à ces mensonges qui m'ont poussée vers la valise ou le cercueil, j'ai gardé intact cette soif de croire, croire en ceux qui m'ont aimé, croire en ce qui a nourri tant mon corps que mon âme, croire que la vie est une belle aventure, croire qu'une autre belle histoire attend que nous allions la chercher, croire en moi et en l'amour qui m'habite.
Combien n'ont pu surmonter cette déchirure, ce déracinement, laissant couler dans leurs veines les regrets et cette brûlure au coeur. Je peux les comprendre car je sais tout comme eux combien il est difficile en plus d'avoir tout perdu de réaliser combien nous avons été bernés, manipulés.
Le pire ensuite, d'être rejeté des deux côtés cela peut vous engloutir ou bien pousser à démontrer que même abandonné et trahi par les siens on continue à garder la tête haute et son coeur fidèle.
Mon Novembre d'aujourd'hui est sans doute façonné par ce Novembre lointain, toujours présent en moi, et les douleurs qu'il ouvrait ainsi pour le reste de ma vie. Mais cet apprentissage m'a certainement appris à prendre les décisions qui m'étaient nécessaires pour continuer à vivre selon mes convictions ainsi que mon besoin d'exprimer ce que j'ai en moi.
Les années étant passées, d'autres étapes se sont succédées dans ma vie mêlant le merveilleux au déchirant en passant par toutes les variations que l'on rencontre au cours d'une vie.
La solitude a fait son apparition, s'imposant à moi non par mon choix, mais par le choix encore une fois de la vie. Le choix contre lequel personne ne peut lutter.
Alors après le refus, la colère une fois de plus est venue me visiter comme à chaque fois que de telles décisions me sont imposées. Cette fois encore ma colère a fait place à la reconnaissance envers la vie lorsque ma mémoire m'a rappelé ceux qui n'ont pu relever la tête.
La solitude qui sans demander mon avis a pris possession de mon hiver je l'ai adoptée, cajolée jusqu'à en faire une amie. Une amie qui sait m'écouter, me comprendre et prendre soin de moi.
Pourquoi chercher à combler cette solitude par des transformations de notre identité.
Pourquoi se perdre dans des mots de parjures et des gestes de déni de ce que l'on est afin de se créer une autre identité sans souvenirs….sans mémoire !
Rejeter tout ce qui a été notre vie pour imiter une autre identité, brûler ceux qui nous ont aimé et nous ont tenus la main sur le bûcher de l'oubli.
Prendre d'autres chemins, d'autres façons de satisfaire son besoin d'exister cela est bon et nous fait avancer et grandir dans une vie plus harmonieuse. Mais assécher toutes les rivières qui nous ont désaltérés pour laisser derrière soi un désert d'incompréhension cela ressemble plus à un mal être, une peur du temps qui nous rappelle que notre hiver arrive.
Pourtant comme l'hiver peut se montrer plus doux lorsque la solitude est notre amie et nous offre ce présent si précieux qu'est notre liberté.
En attendant cet hiver je veux continuer à profiter de l'automne qui me ralentissant dans mes occupations, me permet d'avoir plus de temps pour sourire à chaque lever de soleil et remercier chaque coucher de soleil.
Certes en ce mois de triste anniversaire ma mémoire se souvient que le soleil de mon enfance m'a été enlevé, pourtant personne ne peut éteindre son rayonnement qui réchauffe mon coeur. Mon soleil je ne l'ai pas remplacé par celui de Provence, je l'ai simplement gardé en moi afin qu'il continue à réchauffer ma mémoire en lui apprenant à laisser de la place pour les rayons de celui qui brille au dessus de moi aujourd'hui afin de pouvoir continuer à aimer.